Souvenirs de concerts #1

Bonjour tout le monde !

Aujourd’hui, j’inaugure un nouveau « format » sur le blog qui me trottait dans la tête depuis plusieurs semaines.
En effet, puisque les concerts sont à l’arrêt (voire au point mort) depuis quasiment un an, je me suis dis que ça pouvait être sympa de les revivre en me parlant de vos meilleurs souvenirs de concert, que ce soit en tant que spectateur/spectatrice, organisateur/organisatrice ou encore musicien-ne./

Pour inaugurer cette nouvelle section, on démarre très fort avec l’ami Arnaud aka Maniak. 

Fan de gore, d’insectes et de metal très bruyant, Maniak nous plonge dans la folie d’une soirée grind-core sponsorisée par l’ardeur, l’énergie et la violence. 

Maniak en compagnie de l’album Decomposition Fantasy de Disciples Of Christ

BLOCKHEADS – WHORESNATION – ANUNAKI
Samedi 10 mai 2014 à la Crustygrange

Mes meilleurs souvenirs de concert sont presque toujours liés à un lieu particulier, évidemment voir un artiste que l’on apprécie en grande forme et dans une salle avec un son correct, c’est toujours de bons souvenirs mais quand en plus cela se déroule dans un lieu singulier qui amplifie la performance, cela donne des souvenirs inoubliables.
Donc, la « crustygrange » c’est une grange, perdue dans une vallée vosgienne. Une vraie grange attenante à un corps de ferme avec des poutres en bois et tout. Le plus proche voisin à plus de 100 mètres, derrière la forêt. Ce n’est pas une vraie salle de concert, la ferme est en fait occupée par un zicos qui co-organise des concerts chez lui en lien avec une asso du coin. Ordinairement, les groupes qui y jouent ce sont des petits groupes de hardcore, de crust-punk ou de grindcore, des groupes français, du coin ou en tournée dans les parages. Des groupes à l’échelle de la salle quoi.

© Maniak

La grange est tout en longueur, divisée en deux par une cloison de bois. Une partie pour les distro et l’entrée, et derrière, la salle. Capacité : 50 pelés, s’ils sont bien tassés. La « scène » c’est un tapis à même le sol. Et, agrafée sur la porte du fonds, une relique : une vieille setlist du groupe BLOCKHEADS qui est restée accrochée là depuis qu’ils y avaient joué, au début de leur carrière.
BLOCKHEADS c’est LE groupe de grindcore en France. Formé en 1992 le groupe a bien grandi. C’est devenu la référence du genre et leurs concerts sont particulièrement dévastateurs. En 2012 ils fêtent leurs 20 ans à Nancy devant plus de 1000 personnes, et leur dernier album sorti en 2013 est une réussite de précision et de rapidité.

Voilà, le contexte est posé : 2014, les BLOCKHEADS au faîte de leur carrière, dans la Crustygrange. Les potes de l’asso qui organisent me demandent de faire le dessin du flyer et déjà dans ma tête j’imagine quelque chose approchant les scènes de batailles de Braveheart mais dans les Thermopyles, l’exiguïté faisant office de coefficient multiplicateur de la violence.
Pour l’occasion, la cloison qui séparait la grange a été démontée pour en augmenter la capacité. Évidemment ça affiche complet. Il y a tellement de copains qui se sont déplacés pour l’occasion que je loupe le premier groupe, trop occupé à saluer de vieilles connaissances et à discuter.

© Hugo Chevalier

WHORESNATION arrive ensuite. Ils jouent un grindcore actuel faisant la part belle à la rapidité de la batterie et avec des parties de guitare très techniques. C’est accordé grave ce qui donne de la puissance aux morceaux. Sur scène le cocktail est imparable, c’est solide et ça envoie du lourd, le talent parle. La rapidité du batteur et cette impression qu’il atteint des vitesses stratosphériques tout en gardant une apparente décontraction font plaisir à voir, tandis que les riffs s’enchaînent et que le chanteur remplit son rôle de frontman à la perfection. Le plaisir que les quatre musiciens prennent sur scène est toujours manifeste. Ce set à lui seul était parfait et valait déjà le déplacement.

Mais la tête d’affiche c’est BLOCKHEADS et avec leur set ce soir ils prouvent qu’ils sont toujours les patrons.
Assister aux balances du groupe avant le concert est toujours intéressant : les beuglements du chanteur et la puissance de frappe du batteur qui claquent brusquement dans le vide font figure d’avertissement et résonnent comme un orage lointain : ça n’a pas encore commencé, mais ça approche, et déjà on peut anticiper la brutalité à venir.
Impossible de décrire un concert de BLOCKHEADS sans utiliser le champ lexical de la guerre : une agression sonore sans précédent, une rafale ininterrompue de blasts, des hurlements secs et graves, un mur de son de guitares. Dans le pit, c’est le chaos. Des circle-pit se font et se défont au gré des morceaux et ce, malgré le peu d’espace disponible. Et à chaque instant, un ou deux spectateurs se retrouvent à slamer.
Le son est massif, il écrase et électrise l’audience comme rarement. Quand résonne le break du morceau Follow the bombs, le public semble pris d’une sorte de transe et se déchaîne, semblable à un torrent : fracas des corps qui se heurtent, embruns de bière, on tombe, on nous relève, on y retourne. Je vois le chanteur de WHORESNATION prendre appui sur les murs avec ses pieds pour se propulser en l’air et slamer au-dessus de la foule comme s’il était dans le film Matrix. Tout le monde semble être redevenu un adolescent un peu fou qui découvre son premier concert. Sur scène ça bouge au moins autant, le chanteur notamment ne tient pas en place, saute, tourne, se roule par-terre, harangue la foule et finit par escalader un des murs de la grange pour sauter dans le public depuis les poutres.

© Hugo Chevalier

Quand les derniers riffs de guitares se taisent et que le petit larsen de fin de morceau laisse place au silence on se regarde, épuisés et heureux, avec dans le regard cette lueur : nous venons de partager quelque chose de rare.
L’after se déroule dans la même pièce, public et membres du groupe partagent des bières sur fond de musique électro dansante.

Le lendemain, au réveil je découvre qu’une douleur traverse ma cage thoracique chaque fois que je tousse, me penche, me lève, rigole… une côte bousillée qui mettra des semaines à s’en remettre, témoin persistant de l’intensité de la veille. Bien sûr, les meilleurs souvenirs de concert sont toujours ceux qui font mal le lendemain.

Maniak est aussi illustrateur, retrouvez tout son univers ici.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s